Patricia Beldade

Patricia Beldade - chaire junior 2016

Patrícia Beldade rejoindra le périmètre du LabEx TULIP au cours du premier trimestre 2016. Grace à un package junior et une expérience internationale, elle y développera une approche scientifique novatrice au sein du laboratoire EDB et du Labex.

Quel a été votre parcours ?

Patrícia Beldade : « Après mes études au Portugal et un stage ERASMUS en France, j’ai fait ma thèse en Hollande avec Paul Brakefield dans le domaine de la biologie évolutive grâce à un programme doctoral de l’institut Gulbenkian, près de Lisbonne. Après un post-doc de trois ans à Irvine (Californie) avec Tony Long, je suis retournée en Hollande pour un poste d’ « assistant professor » à l’université de Leiden. J’ai finalement rejoint l’institut Gulbenkian grâce à un financement sur projet (équivalent de l’ANR au Portugal)* mais n’irai cependant pas au terme de mon deuxième financement… puisque je vais rejoindre, avec l’appui du LabEx TULIP, le laboratoire EDB. »

Pour quelle raison rejoignez-vous le LabEx ?

P.B. : « Ce qui m’a séduite dans le projet TULIP, c’est l’intégration d’expertises dans des disciplines très diverses, ainsi que la complémentarité des approches traitant de différents niveaux d’organisation biologique. J’ai hâte de bénéficier de cet environnement pour répondre à des questions relatives à la plasticité phénotypique, c’est à dire la variation due à l’environnement, et à son rôle dans l’évolution des organismes. Quels mécanismes président à la variation intra-spécifique ? Comment l’expression des gènes et le développement d’un individu est-elle influencée par l’environnement ? Mon modèle premier, les papillons, a été choisi en raison de la facilité d’observation de sa variation. Que ce soit pour échapper à leurs prédateurs, attirer des partenaires sexuels, ou se réchauffer, des individus avec des patrimoines génétiques identiques peuvent montrer d‘importantes variations de taille et de motif de leurs ailes. C’est la plasticité phénotypique : l’environnement module le développement des organismes créant ainsi des différences. L’exemple probablement le plus connu dans ce domaine reste les fourmis ou les abeilles où selon la quantité et/ou la qualité de la nourriture ingérée, elles peuvent devenir reines, ouvrières ou soldats. »

Quel type de plasticité avez-vous étudié en observant les couleurs des ailes de papillons ?

P.B. : « Il y a deux motifs dans l’organisation morphologique des êtres multicellulaires qui sont très bien représentés chez les ailes de papillons. D’une part, des éléments structurels répétés, comme peuvent l’être les pétales des fleurs ou les vertèbres et d’autre part, des nouveautés ou traits qui apparaissent dans une seule lignée, comme le placenta chez les mammifères ou les plumes chez les oiseaux. Utilisant les patrons de couleur sur les ailes de papillons, j’ai étudié ces deux thèmes.

Le fait que les éléments répétés partagent les mêmes bases génétiques et la même logique de développement, pourrait être perçu comme un frein à l’évolution. En effet, leurs bases communes pourraient conduire à penser qu’ils constituent un handicap si la population doit, pour s’adapter, les faire évoluer de manière divergente. Testant cette hypothèse chez les papillons, on a appris que l’évolution divergente des traits répétés est beaucoup plus facile qu’on ne le croyait. Même s’ils partagent leurs gènes de base, la régulation de ces derniers est faite de façon indépendante.

Banynana male - David Duneau

Banynana male - David Duneau

En ce qui concerne les nouveautés morphologiques, j’ai abordé la question de leur origine et de leur diversification. On pourrait penser que de nouveaux traits proviennent de l’apparition de nouveaux gènes mais c’est bien souvent le contraire car les  nouveaux traits sont souvent le fruit d’un véritable recyclage de gènes déjà existants ! Chez certains coléoptères, par exemple, les gènes impliqués dans le développement des cornes s’avèrent être dérivés de gènes impliqués dans le développement des pattes chez tous insectes. »

Quel sera plus particulièrement votre projet au sein de TULIP ?

P.B. : « Mon projet dans le cadre de TULIP, qui relève de « l’EcoEvoDevo » (Écologie, Évolution, Développement), porte sur l’effet de l’environnement sur l’expression du phénotype en incluant les bases génétiques de ce phénomène. Plus précisément, les recherches porteront sur les effets de la température et des environnements complexes, lors du développement, sur le phénotype adulte. Cela pourra déboucher à terme sur la question des conséquences de la plasticité sur la réponse au réchauffement climatique, cette plasticité se révélera-t-elle avantageuse ou désavantageuse ? Cette thématique est d’ailleurs, bien plus développée dans le règne végétal. L’influence de l’environnement étant mieux connue chez les plantes, j’espère pouvoir bénéficier d’interactions avec la communauté TULIP pour mieux comprendre ces mécanismes et les extrapoler au règne animal…

Date de modification : 07 juin 2023 | Date de création : 26 octobre 2015 | Rédaction : G. Esteve