Résistance globale chez les plantes : une défense sur le long-terme

Résister, oui, mais si cette résistance n’implique qu’un seul obstacle, aussi grand soit-il, l’envahisseur parviendra a rapidement le contourner. C’est sur ce constat que les chercheurs du LRSV (UMR 5546 - CNRS/UPS), se sont basés pour étudier chez la plante modèle M. truncatula, une résistance « quantitative », résistance jouant sur plusieurs mécanismes et donc, plus durable. Une recherche tout sauf anecdotique, puisque cette résistance contre un certain Aphanomyces euteiches, pourrait être transférée à terme vers le pois et la luzerne dont il est, à l’heure actuelle, la principale cause de destruction.

La luzerne et le pois sont des légumineuses cultivées respectivement pour leur biomasse végétale et leurs graines, riches en protéines. Leur croissance est étroitement liée à leur capacité à assimiler efficacement l’azote via l’établissement de symbioses racinaires, alliance à bénéfice réciproque entre la plante et des micro-organismes du sol. Le système racinaire, au sein duquel pénètrent ces derniers, est malheureusement aussi convoité par des hôtes bien moins intentionnés. Parmi ceux-ci, se trouve l’oomycète Aphanomyces euteiches, responsable de la pourriture racinaire, principale maladie du pois en Europe et facteur limitant de la luzerne aux États-Unis. Seules des rotations culturales ou la jachère ralentissent sa propagation, les terres touchées demeurant « infectées » d’une année sur l’autre…

Chez la légumineuse modèle Medicago truncatula, proche de la luzerne, et également confrontée aux parasites, les chercheurs ont noté une variabilité dans la réponse à l’infection. Malgré la présence du parasite, certaines lignées de plantes sont capables de retarder sa progression, autorisant la plante à poursuivre son développement. Cette forme de résistance est dite « multigénique » car elle fait appel à différents mécanismes. Il s’agit moins pour la plante de posséder « la » protéine qui mettra le parasite hors d’état de nuire que de mettre en place une série d’obstacles à sa progression. De cette manière, le parasite doit s’adapter à une succession de barrières, nécessitant de sa part une évolution bien plus poussée ou une période de temps bien plus importante que s’il n’y en avait eu qu’une seule à contourner.

Les chercheurs du LRSV ont testé in vitro et en serre quelques 179 lignées de M. truncatula (soit un total de plus de 10 000 plantules testées). Comparant le génome des plus sensibles aux plus résistantes, plusieurs gènes candidats ont été identifiés. Parmi ceux-ci, un gène codant pour une protéine à domaine « F-box » semble jouer un rôle majeur. Poussant leurs investigations plus avant, les chercheurs ont remarqué que la différence de résistance n’était pas liée à la quantité de protéine produite mais à la présence de mutation affectant sa capacité à interagir avec d’autres molécules de son environnement. Point inattendu, les protéines à F-Box incomplètes ou du moins non-fonctionnelles sont celles qui confèrent la plus grande résistance aux plantes porteuses… Perspective logique de ce travail, les chercheurs se focalisent dorénavant sur la découverte de la cible de cette fameuse protéine F-Box, au rôle si…inversé.

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Voir aussi

Bonhomme M, André O, Badis Y, Ronfort J, Burgarella C, Chantret N, Prosperi JM, Briskine R, Mudge J, Debéllé F, Navier H, Miteul H, Hajri A, Baranger A, Tiffin P, Dumas B, Pilet-Nayel ML, Young ND, Jacquet C. High-density genome-wide association mapping implicates an F-box encoding gene in Medicago truncatula resistance to Aphanomyces euteiches. New Phytol. 2014 Mar;201(4):1328-42 - Projet IMMUNIT-AE           

Date de modification : 07 juin 2023 | Date de création : 18 avril 2014 | Rédaction : Gael Esteve