Ralstonia solanacearum

Portrait d’une bactérie championne des rings

On a pu parfois désigner la vaste famille de bactéries qui composent l’espèce Ralstonia solanacearum, comme le « Mike Tyson » des phytopathogènes, Pendant plusieurs dizaine d’années plusieurs groupes de recherches à travers le monde se sont attelés à déchiffrer les différents secrets du pouvoir pathogène de cette bactérie. C’est donc à l’occasion de l’assemblage d’un tel puzzle que S.Genin (CNRS-INRA) et T.P.Denny (Université de Géorgie, USA), dressent le tableau de cette célèbre bactérie.

« Ralstonia solanacearum », répandue depuis les zones intertropicales jusque aux zones tempérées, cause chaque année de grosses pertes au sein des récoltes. En effet, touchant les cultures maraîchères d’abord, du genre des Solanacées à qui elle doit donc son nom, (tomates, poivrons, aubergines, tabac mais également responsable de la « pourriture brune » de la pomme de terre…) elle compte parmi ses remarquables facultés une capacité à franchir le mur des espèces : arachide, géranium, bananiers…Mais aussi les ligneux tels que l’eucalyptus ou le mûrier sont autant de victimes potentielles.

A l’exception du bananier, pour lequel elle peut se transmettre par voie aérienne grâce aux insectes, la bactérie infecte toujours ses hôtes par les racines : soit par des blessures occasionnées par l’homme lors des travaux de culture, soit par les zones de faiblesses racinaires lors de la croissance de la plante. Evoluant depuis les racines, Ralstonia vient se loger dans les vaisseaux conducteurs de la plante, le xylème. Une fois  atteints, elle s’y multiplie très rapidement à haute densité si bien qu’elle les obstrue, privant la plante d’eau. Cette dernière se met à flétrir brutalement, et se transforme en quelques jours en véritable bouillon de culture bactérien : un indiscutable « K.O. »

Clef de voûte de cette efficacité, les chercheurs ont identifié un cocktail de protéines que les bactéries utilisent afin de neutraliser la réponse immunitaire de la plante. Ce cocktail n’est pas, qui plus est, spécifique d’une plante mais peut s’adapter au large spectre d’hôtes de la bactérie.

On peut s’interroger sur la stratégie brutale de cette ‘championne du ring’, cependant la multiplication abondante de la bactérie à la mort de son hôte et lors de son retour dans le sol, milieu concurrentiel s’il en est, la mettrait en position d’avantage numérique par rapport à ses consœurs occupant déjà le territoire. Pour autant Ralstonia solanacearum peut aussi infecter des « mauvaises herbes » de manière latente sans les tuer. C’est un des principaux axes de recherche, qui avec la rotation culturale -mettre en cas d’infection une variété de plantes ne pouvant être infectée par la bactérie- constitue une piste prometteuse : en comprenant ce qui régule son pouvoir infectieux les chercheurs espèrent pouvoir stimuler les défenses des plantes.

Propos recueillis auprès de S.Genin

Voir aussi

Stéphane Genin & Timothy P. Denny - Annu. Rev. Phytopathol. 2012.50:67-89 - Doi: 10.1146, 28 août 2012

Date de modification : 07 juin 2023 | Date de création : 05 décembre 2012 | Rédaction : GE