Nouvelle avancée dans la compréhension de la mémoire immunitaire chez l'huître creuse du Pacifique

Dans un article publié en février 2020, plusieurs chercheurs de l’unité Interactions Hôtes-Pathogènes-Environnement (UMR 5244 UPVD, CNRS, Ifremer, UM), fournissent la première analyse transcriptomique complète du priming immunitaire chez l’huître d’intérêt commercial Crassostrea gigas. La protection repose sur le maintien à long terme des défenses immunitaires préparant l’huître à faire face à une future infection virale.

Au cours de la dernière décennie, d'importantes découvertes ont montré que la résistance à la réinfection peut être obtenue sans immunité adaptative véritable, introduisant le concept de mémoire immunitaire innée chez les invertébrés. Cependant, les recherches dans ce domaine ont été limitées par le nombre restreint de mécanismes moléculaires mis en évidence pour expliquer ces phénomènes. Utilisant comme modèle l'huître creuse du Pacifique (Crassostrea gigas), une espèce invertébrée qui présente l'une des périodes de protection les plus longues et les plus efficaces contre les infections virales observées chez un invertébré, les chercheurs de l’unité IHPE, unité ayant rejoint TULIP en 2019, fournissent la première analyse transcriptomique complète sous-jacent le priming immunitaire antiviral chez un invertébré.

Le priming immunitaire ou mémoire immunitaire innée a été mis en évidence dans de nombreux embranchements invertébrés. Si des modèles mécanistiques ont été proposés, les études moléculaires visant à soutenir ces modèles sont restées rares. Dans cet article, les chercheurs du laboratoire IHPE révèlent la signature transcriptionnelle associée à au priming immunitaire dans les huîtres Crassostrea gigas, l’huître creuse du Pacifique, espèce d’intérêt économique car la plus cultivée dans le monde.

Après amorçage avec du poly (I :C), un ARN double brin synthétique structurellement semblable aux  ARN double brins de certains virus, les huîtres étaient entièrement protégées contre l'herpèsvirus Ostreid 1 (OsHV-1), un pathogène majeur de l'huître. Une analyse globale par séquençage de l'ARN des huîtres et des gènes viraux après priming et infection virale a révélé que le poly (I :C) induit une forte réponse antivirale qui altère la réplication d'OsHV-1.

La protection repose sur une régulation positive soutenue des gènes immunitaires qui contrôlent l'infection virale ultérieure. Cet état d'alerte antiviral persistant reste actif pendant 4 mois et permet une protection antivirale à long terme. Ce mécanisme de résistance acquis mis pour la première en évidence chez un invertébré apporte de nouveaux éléments pour comprendre les fondements moléculaires d’une mémoire immunitaire innée persistante dans le temps. Il ouvre en outre la voie à des applications (pseudovaccination) pour faire face à une maladie récurrente qui provoque des pertes économiques dramatiques dans l'industrie conchylicole du monde entier.

Voir aussi

A Sustained Immune Response Supports Long-Term Antiviral Immune Priming in the Pacific Oyster, Crassostrea gigas. mBio 11:e02777-02719 2020. Lafont, M., A. Vergnes, J. Vidal-Dupiol, J. de Lorgeril, Y. Gueguen, P. Haffner, B. Petton, C. Chaparro, C. Barrachina, D. Destoumieux-Garzon, G. Mitta, B. Gourbal, and C. Montagnani.

Date de modification : 07 juin 2023 | Date de création : 25 mai 2020 | Rédaction : Guillaume Cassiède-Berjon