Des données solides pour étayer un changement de position des éponges dans la classification des animaux

La position des éponges et des Cténophores dans l’arbre du vivant pose un problème majeur dans la compréhension de l'évolution des animaux depuis quelques années. Une nouvelle étude publiée dans Current Biology par Paul Simion, Hervé Philippe (dont l'arrivée à SETE a été accompagnée par un Package TULIP en 2013) et Michaël Manuel cherche à surmonter ce problème en échantillonnant un nombre plus important d'espèces et de gènes tout en éliminant le plus de données erronées souvent introduites dans les données issues du séquençage à haut débit.

Les Cténophores, qu’est-ce que c’est ?

Les cténophores sont des organismes marins planctoniques répandus dans tous les océans du monde. Carnivores, ils se déplacent grâce à des cils locomoteurs afin d’atteindre leurs proies. Ils constituent une bonne part de la biomasse planctonique mondiale. Les cténophores les plus connus sont la groseille de mer (Pleurobrachia pileus) et la ceinture de Vénus (Cestum veneris).

L’aspect novateur de cette étude est la constitution d’un jeu de données de 1 719 gènes surpassant en taille et en qualité les jeux de données précédents utilisés pour traiter les relations de parenté phylogénétique entre métazoaires. Les auteurs se sont en effet attachés à utiliser beaucoup plus de contrôles qualité à toutes les étapes, et ont proposé plusieurs innovations méthodologiques afin d’éviter toute une gamme d'erreurs de données résultant de contaminations dans le séquençages à haut débit, ou les potentielles erreurs de séquençage elles-mêmes, ainsi que les duplications de gènes.

L’origine du système nerveux et des muscles

Plusieurs études soutenaient une typologie dans laquelle les cténophores sont le groupe frère de tous les autres animaux (y compris les éponges du groupe Porifera). En revanche, d’autres études phylogénomiques soutenaient le scénario alternatif dans lequel les éponges (Porifera) sont le groupe frère de tous les autres animaux (incluant les cténophores), une hypothèse cohérente avec une seule origine de l'intestin, des cellules nerveuses et des cellules musculaires.

Les résultats de Simion et al. suggèrent que les éponges (Porifera) et non les Cténophores sont la première lignée à se séparer des autres animaux, supportant par la même la vision classique des morphologistes. En effet, la phylogénie établie grâce par Simion et al. suggère que les muscles et le système nerveux sont apparus plus tard que ce que soutient la phylogénie mettant les Cténophores à la base des animaux.

Ces résultats, beaucoup plus cohérents avec les modèles d’apparition des animaux à partir des unicellulaires, rappellent que les problèmes méthodologiques doivent être soigneusement affrontés et résolus pour pouvoir aborder des questions phylogénétiques difficiles car très anciennes.

Date de modification : 16 novembre 2017 | Date de création : 17 octobre 2017 | Rédaction : Guillaume Cassiède-Berjon & Hervé Philippe